08/09/2008

Foire à tout

Vide-grenier ce dimanche vers 11h00 : on y trouve de tout. Et il en va des choses comme des gens. Voisinent côte à côte, à l'occasion de ce grand rassemblement de la chine dominicale, des gens qui pour autant diffèrent en tout les uns des autres. Là, un couple assis sur des pliants de plage derrière un étalage de choses improbables et d'une laideur sans nom: exemplaires du Reader's Digest, un parasol Heineken, des cassettes pornographiques dont la jaquette semble encore luire de sécrétions inavouables, des 45 tours de Mireille Mathieu et Patrick Juvet, un poste à galène éventré, au final des bouts de trucs et de machins sans nom et sans âme qui feraient fuir des chiffonniers. Et eux, là, guettant le passant. Lui, râblé, barbu, une épaisse chaîne d'argent au cou, des mains de terrassiers
qui ne terrassent plus depuis longtemps. D'un oeil il surveille son petit trésor. L'important à cette heure n'est néanmoins plus là: car, déjà, il se consacre à son Pastis 51 avec une componction de prélat défroqué. Sa femme, coiffée d'un ridicule chapeau de paille, est avachie plutôt qu'assise, l'air abruti, les joues passablement couperosés, la mine d'une grisette sur le retour. Juste à côté, une planche sur deux tréteaux donne à voir le contraste le plus saisissant : deux vases en porcelaine sur monture de bronze, des assiettes aux décors de grand feu en polychromie douce, un encrier Napoléon III en bronze doré, un portait du prince de Condé, et des étoffes que le propriétaire nomme à qui veut les entendre : guipure, crêpe, taffetas. Je le regarde à l'œuvre. Je lui demande le prix d'un joli coffret en palissandre. Il me le dit. Je passe mes doigts sur le bois. Il me sourit, puis sa bouche dessine une moue qui semble dire: oui, je sais. Veuillez m'excuser. Il faut bien vivre. sic transit gloria mundi. Voilà. Apparentements terribles. Et ce vent qui crie : "On solde!" Ca ira. Ca ira.