17/11/2007

Six lances, dix cibles

Dix paraît. Il est au volant d'une Fiat de luxe. Un virage familier, il sait qu'une femme l'attend. Elle lui fera signe. Il est si sensible, Dix. Alors bien sûr, il faudra qu'il descende un rapport, deux. Il s'arrêtera, mais sans se garer, car il connaît bien le coin. Elle ne dira pas « gare-toi », sa passagère, simplement parce qu'elle ne veut pas le tutoyer. Elle montera. Rien ne dit qu'elle parlera.

Ils rouleront en silence pour tromper l'ennui. Même pas de messes basses ni de rires coupables, non, mais un épais brouillage. Quelques sourires comme des lames, dents serrées, lèvres tirées.

Il écoute aux portes, Dix. Aujourd'hui, c'est aux portières. Des coups retentissent parfois. Il en compte six, mais pas encore dix. Entre le souffle de seins que l'on palpe, deux, jamais un cri. Zéro. A peine un murmure pour séparer les aphonies en leur crescendo. Il doit y en avoir cent. Puis Six, car c'est ainsi qu'elle s'appelle (mais il faut prononcer l'X, le son S étant dépassé puisqu'eux sont deux), descend de la voiture des douceurs non dites, car ça n'a pas assez duré.

Elle compte sur lui, Six sur Dix, puis s'en va. Sans un mot.